Actuellement, dans l’Union européenne, un pourcentage élevé de l’énergie consommée par les bâtiments est consacré à la régulation de leur température intérieure. Le chauffage et le refroidissement représentent jusqu’à la moitié de la consommation d’énergie de l’UE [4]. Par conséquent, la recherche de la plus grande efficacité énergétique possible est une priorité dans les nouvelles constructions. Cependant, un défi tout aussi important consiste à réduire au maximum l’impact environnemental des matériaux d’isolation.
Il existe différents types de matériaux d’isolation disponibles sur le marché. Or, ils ne sont pas tous aussi durables. Pour obtenir une meilleure performance environnementale du bâtiment, il est fondamental de sélectionner ses matériaux en tenant compte non seulement de leurs propriétés isolantes, mais aussi de leur cycle de vie complet. Il est nécessaire de prendre en compte les questions liées aux ressources qui entrent dans leur production, leurs processus de fabrication, leur recyclabilité et leur impact sur la qualité de l’air intérieur.
À l’heure actuelle, les matériaux d’isolation les plus répandus sont d’origine minérale ou fossile, comme le polystyrène, le polyuréthane à cellules fermées, la fibre de verre et les matelas de laine minérale, bien qu’il soit prouvé que leur processus de production consomme beaucoup d’énergie, entraîne l’épuisement de ressources limitées et une pollution résultant de l’exploitation minière. Ces matériaux peuvent également émettre des composés volatils qui constituent une menace pour la santé humaine [5].
Les matériaux d’isolation biosourcés apparaissent comme une alternative prometteuse dans les applications d’enveloppe du bâtiment. Ils sont fabriqués à partir de sous-produits agricoles (par exemple le liège) ou de matériaux recyclés (par exemple les vieux journaux).
Une recherche développée par Jan van Dam et Martien van den Oever à l’Université de Wageningen (2012) souligne que les performances techniques de plusieurs matériaux d’isolation renouvelables, comme la cellulose et les fibres de chanvre et de coton, sont comparables à celles des références minérales. Selon les chercheurs, les matériaux d’isolation renouvelables pourraient facilement remplacer les produits traditionnels sans perte de performance (voir tableau 1)[5].
Par rapport aux matériaux d’isolation courants, les matériaux biosourcés présentent plusieurs avantages. En tant que ressource renouvelable, les isolants naturels nécessitent beaucoup moins d’énergie que les isolants conventionnels pour être produits. Ils sont également neutres ou négatifs en termes de CO2, car ils fixent naturellement le CO2 pendant leur phase de croissance et ils présentent un potentiel d’acidification plus faible, qui tient compte du SO2 émis dans l’air qui entraîne une déviation du pH du sol (voir tableau 2).
En outre, de nombreux matériaux isolants biosourcés proviennent de l’agriculture et de la sylviculture régionales, ce qui réduit les distances de transport, diminue la dépendance aux importations et renforce l’économie locale [2].
Un autre avantage très important des matériaux d’isolation naturels est leur cycle de vie circulaire. Certains d’entre eux, comme les flocons de cellulose et les algues, peuvent être réutilisés. D’autres, comme le chanvre et la laine de mouton, peuvent être recyclés.
Il convient de souligner que la qualité des produits dépend de la méthode de production et de la façon dont la matière première est récoltée. Il est donc nécessaire de repenser et d’adapter l’ensemble du processus, à partir de la culture, afin que le produit final présente les meilleurs paramètres en fonction de sa destination finale. Un bon exemple serait la paille. Les moissonneuses-batteuses classiques coupent les céréales lors de la récolte de manière à endommager les tiges et à accélérer ainsi la décomposition des résidus de récolte. Cependant, lors d’une récolte destinée à la production de la paille pour l’isolation, il est préférable de conserver les tiges les plus longues et les moins endommagées possible. Et cela nécessite un autre type d’outillage.
La recherche scientifique a montré que la plupart des matériaux d’isolation biosourcés peuvent accumuler et acheminer l’humidité. Cet effet de régulation de l’humidité contribue à un climat intérieur confortable tout au long de l’année. Il a également un effet positif sur la santé des personnes, notamment celles souffrant de maladies respiratoires, pour lesquelles une humidité intérieure constante est importante [2]. En outre, l’isolation naturelle protège efficacement contre le bruit provenant de l’intérieur et de l’extérieur d’un bâtiment. Des recherches montrent que le lin et la cellulose, par exemple, sont comparables à la laine de verre et à la laine de roche en termes de propriétés d’absorption acoustique [5].
Les isolants biosourcés peuvent concurrencer les matériaux conventionnels en termes de qualité et de propriétés isolantes. En outre, ils présentent de meilleures performances au regard de l’évaluation globale de l’impact environnemental. Malgré cela, les isolants fabriqués à partir de matières premières renouvelables jouent encore un rôle secondaire pour les consommateurs. L’une des principales raisons est leur prix, qui reste plus élevé que celui des matériaux d’origine fossile ou minérale. Les matériaux isolants biosourcés ne sont souvent disponibles qu’en petites quantités et ne présentent donc pas les avantages en termes de prix de revient associés à une production à grande échelle. Mais, avec un marché en expansion, on peut s’attendre à ce que les différences de prix observées s’équilibrent et rendent les matériaux biosourcés plus compétitifs. Il convient également de noter que la part des matériaux d’isolation dans le coût total de la construction est très faible, de sorte qu’une augmentation du prix d’achat de ces produits n’a qu’une faible influence sur le coût final d’un bâtiment [5]. Une autre raison de la faible participation des matériaux d’isolation renouvelables sur le marché est le fait que l’industrie de la construction ne les connaît pas, ni leurs caractéristiques ni leurs avantages particuliers. C’est pourquoi il faut promouvoir la valeur ajoutée des matériaux biosourcés.
Par Danielle Khoury Gregorio et Anna Juda
Sources:
[1] Schulte, Maximilian; Lewandowski, Iris; Pude, Ralf; Wagner, Moritz. Comparative life cycle assessment of bio-based insulation materials: Environmental and economic performances. GCB Bioenergy. Volume 13, Issue 6 – June 2021.
[2] Bio-based insulation materials facts & myths. Allthings.Bio.
[3] Simons, Kristina; Franken, Marcus. Alle ökologischen Dämmstoffe im direkten Vergleich. Natürlich dämmen.
[4] Heating and cooling – European Commission
[5] Visser, Chris de; van Wijk, Kees; van der Voort, Marcel. Health, comfort, energy use and sustainability issues related to the use of biobased building materials. Wageningen UR. February 2015